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cin juif fendit la foule et cria au porte-glaive en disant : « Attends ! ne fais rien ! C’est moi seul qui l’ai tué ! » Puis il raconta ainsi la chose : « En effet, sachez tous que cet homme est venu me trouver pour me consulter afin que je le guérisse. Et comme je descendais l’escalier pour le voir, et qu’il faisait nuit, je l’ai heurté du pied : alors il a roulé jusqu’au bas de l’escalier et il est mort. Ainsi donc on ne doit pas tuer l’intendant, mais moi seulement ! »

Alors le wali ordonna la mort du médecin juif. Et le porte-glaive enleva la corde du cou de l’intendant et la mit au cou du médecin juif et allait exécuter le médecin, quand on vit arriver le tailleur qui fendilla foule et dit au porte-glaive : « Oh ! arrête-toi ! C’est moi seul qui l’ai tué ! Voici ! Hier je passai ma journée à flâner, et je revins, vers le soir, à la maison. En route, je rencontrai ce bossu, qui était ivre et fort gai, et il tenait à la main un tambour à grelots dont il s’accompagnait en chantant de tout son cœur et d’une façon fort réjouissante. Alors je m’arrêtai pour le voir et m’amuser, et j’en éprouvai un tel plaisir que je l’invitai à m’accompagner à la maison. Comme j’avais, entre autres choses, acheté du poisson, ma femme, lorsque nous nous fumes assis pour manger, prit un morceau de poisson qu’elle mit dans un morceau de pain, et elle en fit une bouchée qu’elle fourra dans la bouche du bossu ; et la bouchée étouffa le bossu, qui mourut aussitôt. Alors, moi et ma femme, nous le prîmes et nous le portâmes à la maison du médecin juif. Une négresse descendit qui nous ouvrit la porte ; et je lui dis : « Dis à ton maître qu’il y a à la porte une femme et un homme