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histoire du bossu… (el-aschar)
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Pendant que mon-frère se lamentait de la sorte en déplorant la perte de son capital avec les intérêts, voici qu’une femme de haut rang vint à passer par là se rendant à la mosquée pour la prière du vendredi. Elle dépassait en beauté les femmes les plus belles ; de toute elle, se dégageait une vivifiante odeur de musc ; elle était montée sur une mule harnachée de velours et de brocart d’or ; elle était accompagnée d’un nombre considérable de serviteurs et d’esclaves. À la vue de tous ces verres cassés et de mon frère qui se lamentait si fort en pleurant, la compassion entra en son cœur et la pitié, et elle s’informa du motif d’un tel désespoir. Il lui fut répondu que le pauvre homme avait un panier de verreries dont la vente le faisait vivre, que c’était là tout son capital, mais qu’il ne lui en restait plus rien après l’accident qui lui avait tout cassé en morceaux. Alors cette femme appela l’un de ses serviteurs et lui dit : « Donne à ce pauvre homme tout ce que tu portes d’argent sur toi. Et le serviteur détacha immédiatement de son cou, où elle était fixée par un cordon, une grande bourse qu’il remit à mon frère. El-Aschar la prit, l’ouvrit et y trouva, après les avoir comptés, cinq cents dinars d’or. À cette vue il faillit mourir d’émotion et de la force de sa joie, et il se mit à appeler sur sa bienfaitrice toutes les grâces et les bénédictions d’Allah.

Devenu ainsi riche d’un moment à l’autre, El-Aschar, la poitrine dilatée de plaisir, se rendit à sa maison pour y mettre cette fortune, et il s’apprêtait à sortir pour aller à la recherche de quelque belle maison à louer où vivre à son aise, quand il enten-