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histoire du gâteau échevelé…
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moment où il s’était marié, pauvre raccommodeur de savates, avec la calamiteuse du Caire, jusqu’au jour où il avait trouvé le trésor et l’anneau magique dans le champ du pauvre fellah. Mais il n’y a point d’utilité à la répéter.

Et le roi et le vizir, au récit de cette histoire qu’ils étaient loin d’avoir imaginée aussi stupéfiante, se regardèrent en se mordant la paume. Et le vizir dit à Mârouf : « Ô mon maître, montre-nous un peu cet anneau qui possède de si merveilleuses vertus. » Et Mârouf, comme un fou privé de raison, ôta de son doigt l’anneau et le remît au vizir, en disant : « Le voici ! Il contient, dans sa cornaline, mon ami l’éfrit Père au Bonheur. » Et le vizir, les yeux flamboyants, prit l’anneau et en frotta le chaton, comme l’avait expliqué Mârouf.

Et aussitôt la voix sortit de la cornaline, disant : « Me voici ! me voici ! commande et j’obéis ! Veux-tu ruiner une ville, bâtir une capitale ou tuer un roi ? » Et le vizir répondit : « Ô serviteur de l’anneau, je t’ordonne de t’emparer de ce roi proxénète et de son gendre Mârouf, l’entremetteur, et de les jeter dans quelque désert sans eau pour qu’ils y meurent de soif et de privation. » Et, à l’instant, le roi et Mârouf furent enlevés comme un fétu de paille et transportés dans un désert sauvage tout à fait affreux, qui était le désert de la soif et de la faim, habité par la mort rouge et la désolation. Et voilà pour eux.

Quant au vizir, il s’empressa de convoquer le diwân, et exposa aux dignitaires, aux émirs et aux notables que le Bonheur des sujets et la tranquillité de l’État avaient exigé que le roi et son gendre