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histoire du gâteau échevelé…
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étonnante dont il nous a si souvent annoncé l’arrivée ne nous a point donné de ses nouvelles. Aussi le roi, ton père, inquiet de cet état de choses, a jugé que toi seule tu pourrais nous éclairer à ce sujet, en nous disant ce que tu penses de ton époux, et quel effet il produit sur ton esprit, et quels soupçons tu as conçus à son égard, durant ces vingt nuits qu’il a passées avec toi. »

À ces paroles du vizir, la princesse répondit de derrière le rideau : « Qu’Allah comble de ses grâces le fils de mon oncle, l’émir Mârouf ! Ce que je pense de lui ? Mais, par ma vie ! rien que le bien. Il n’y a pas sur la terre nerf de confiture qui lui soit comparable pour la douceur, la saveur et le plaisir. Depuis que je suis son épouse, j’engraisse et j’embellis, et tout le monde, émerveillé de ma bonne mine, dit sur mon passage : « Qu’Allah la préserve du mauvais œil, et la sauvegarde des envieux et des jaloux ! » Ah ! le fils de mon oncle, Mârouf, il est une pâte de délices, il fait ma joie et je fais la sienne. Qu’Allah nous laisse l’un à l’autre ! »

Et le roi, ayant entendu cela, se tourna vers son vizir, dont le nez s’allongeait, et lui dit : « Tu vois ! Que t’ai-je dit ? Mon gendre Mârouf est un homme admirable, et tu mérites, pour tes soupçons, que je te fasse empaler ! » Mais le vizir, se tournant du côté du rideau, demanda : » Et la caravane, ô ma maîtresse, la caravane qui n’arrive pas ? » Elle répondit : « Et en quoi cela peut-il me regarder ? Qu’elle arrive ou qu’elle n’arrive pas, mon bonheur en sera-t-il augmenté ou amoindri ? » Et le vizir dit : « Et qui te nourrira désormais, maintenant que les armoires du