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la tendre histoire du prince jasmin…
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dolente du roi Akbar se leva debout sur ses deux pieds, heureuse et dansante. Et son visage était éclairé par le feu du dedans, et toute son âme ivre jaillissait de ses yeux. Et de tout son mal mystérieux, que nul médecin n’avait compris, plus une trace ne subsistait : les simples paroles d’une jouvencelle parlant d’amour l’avaient fait s’évanouir comme la fumée.

Et, vive comme la gazelle, elle rentra dans ses appartements, suivie par sa favorite. Et elle prit le calam de la joie et le papier de l’union, et écrivit au prince Jasmin, l’adolescent ravisseur de sa raison, le bienheureux qu’elle avait vu en songe avec les yeux de son âme, cette lettre aux blanches ailes :

« Après la louange à Celui qui, sans calam, a tracé l’existence des créatures dans le jardin de la beauté.

« Salut à la rose qui a rendu plaintif le rossignol enamouré !

« Quand j’ai entendu la mention de ta beauté, mon cœur a glissé de ma main.

« Quand tu m’as montré ta face féerique en songe, elle a fait une telle impression sur mon cœur, que j’ai oublié mon père et ma mère, et suis devenue étrangère à mes frères. Qu’a-t-on à faire avec sa famille lorsqu’on est étranger à soi-même ?

« Devant toi, les belles sont balayées comme un torrent, et les flèches de tes cils ont percé mon cœur de part en part.

« Ô ! viens me montrer ta forme charmante dans le réveil, afin que je la voie avec les yeux de ma