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les mille nuits et une nuit

sollicitations et ses prières demeuraient sans succès, elle recourut à d’autres voies. Ainsi font les femmes, d’ordinaire, ô Roi du temps. Usant en effet de stratagème, elle envoya dire à la noble Itâbah, mère de Giafar : « Ô notre mère, il faut que tu m’introduises sans retard chez ton fils Giafar, mon époux légal, tout comme si j’étais une de ces esclaves que tu lui procures chaque jour. » Car, chaque vendredi, la noble Itâbah avait pour habitude d’envoyer à son bien-aimé fils Giafar une jeune esclave vierge, choisie entre mille, intacte et parfaitement belle. Et Giafar ne s’approchait de la jeune fille qu’après s’être régalé, et s’être imbibé de vins généreux.

Mais la noble Itâbah, au reçu de ce message, refusa énergiquement de se prêter à cette sorte de trahison que voulait Abbassah, et donna à entrevoir à la princesse ce qu’il y avait, en cette affaire, de périls pour tout le monde. Mais la jeune épouse enamourée insista, pressante jusqu’à la menace, et ajouta : « Réfléchis, ô notre mère, aux conséquences de ton refus. Pour ma part, ma résolution est arrêtée, et je l’accomplirai malgré toi, quoi qu’il puisse m’en coûter. Je préfère perdre la vie que de renoncer à Giafar et à mes droits sur lui. »

Il fallut donc que l’éplorée Itâbah cédât devant de telles extrémités, pensant qu’il était encore préférable que la chose fût accomplie par son intermédiaire, dans les meilleures conditions de sécurité. Elle promit donc son concours à Abbassah pour la réussite de ce complot si innocent et si dangereux. Et elle alla, sans retard, annoncer à son fils Giafar qu’elle lui enverrait bientôt une esclave qui n’avait