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les mille nuits et une nuit

raison s’en va ! » Mais, moi, je gardai en ma mémoire ces paroles de l’imam.

Et donc, comme Allah avait mis en mon cœur la passion de l’étude, cette passion résista à tout, et finit par triompher des obstacles. Et je m’attachai fervemment à Abou-Hanifah. Et le Donateur m’accorda la science et les avantages qu’elle procure, de telle sorte que je montai peu à peu en grade, et je finis par arriver aux fonctions de kâdi suprême de Baghdad. Et j’étais admis dans l’intimité de l’émir des Croyants Haroun Al-Rachid, qui m’invitait souvent à partager ses repas.

Or, un jour que j’étais à manger avec le khalifat, voici qu’à la fin du repas les esclaves apportèrent une grande porcelaine où tremblait une merveilleuse crème blanche, saupoudrée de poudre de pistaches, et dont l’odeur était déjà un plaisir. Et le khalifat se tourna de mon côté, et me dit : « Ô Yâcoub, goûte de ceci. On ne réussit pas tous les jours ce mets. Il est excellent aujourd’hui. » Et je demandai : « Comment s’appelle ce mets, ô émir des Croyants ? Et avec quoi est-il préparé pour être déjà si beau à la vue et si agréable à l’odorat ? » Et il me répondit : « C’est la balouza préparée à la crème, au miel, à la fine fleur de farine et à l’huile de pistaches…

— À ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et, discrète, se tut.