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les mille nuits et une nuit

changée en poule, ou quelque vénérable santon ! Car elle est allée au feu, et le feu l’a respectée ! »

— Une autre fois, il était parti avec une caravane, et les provisions de bouche étaient minimes, et la faim des caravaniers était considérable. Quant à Goha, son estomac le sollicitait tellement qu’il eût avalé la ration des chameaux. Or donc, quand tout le monde se fut assis, à la première halte, pour manger, Goha fut d’une réserve et d’une discrétion qui émerveillèrent ses compagnons. Et comme on le pressait de prendre le pain et l’œuf dur qui lui revenaient de droit, il répondit : « Non, par Allah ! vous autres, mangez et soyez contents ; mais moi il me serait impossible de manger un pain entier et un œuf dur, à moi seul ! Que chacun de vous prenne donc le pain et l’œuf dur qui sont sa part ; puis, si vous le voulez bien, vous me donnerez la moitié de chaque pain et de chaque œuf ; car c’est là toute la capacité de mon estomac, qui est délicat. »

— Et, dans une autre circonstance, il alla chez le boucher et lui dit : « C’est aujourd’hui fête à la maison ! Donne-moi donc le meilleur morceau de viande du mouton gras. » Et le boucher retira pour lui tout le filet du mouton, qui pesait un poids considérable, et le lui remit. Et Goha alla porter tout le filet à sa femme, en lui disant : « Fais-nous, avec cet excellent filet, des brochettes aux oignons. Et assaisonne-les bien à mon goût. » Puis il sortit faire une tournée au souk.

Or, l’épouse profita de l’absence de Goha pour