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histoire de baïbars… (le 11e capitaine…)
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Or, lorsque l’enfant devint grand et avança en âge, sa mère mourut ; et le même jour mourut la mère du poulain.

Et les jours passèrent, et le sultan épousa une autre femme, qu’il choisit parmi les esclaves du palais. Et on mit le garçon à l’école, sans plus veiller sur lui et sans l’aimer. Et l’orphelin de sa mère, chaque fois qu’il revenait de l’école, entrait auprès de son cheval, le caressait, lui donnait à manger et à boire, et lui contait ses peines et son délaissement.

Or, l’esclave que le sultan avait épousée avait un amant qui était un médecin juif — qu’il soit maudit ! Et ces deux-là se voyaient fort gênés, pour leurs entrevues, par la présence au palais précisément de cet orphelin de sa mère. Et ils se demandèrent : « Comment faire ? » Et ils réfléchirent à ce sujet et résolurent d’empoisonner le jeune prince.

Quant à lui, lorsqu’il fut rentré de l’école, il alla voir son cheval, comme d’ordinaire. Et il le trouva pleurant. Et il lui dit, en le caressant : « Qu’est-ce qui te fait pleurer, mon cheval ? » Et le cheval lui répondit : « Je pleure sur la perte de ta vie. » Il lui demanda : « Et qui donc veut la perte de ma vie ? » Il lui répondit : « La femme de ton père, et le médecin juif, ce maudit. » Il demanda : « Comment ça ? » Il dit : « Ils t’ont préparé un poison qu’ils ont extrait de la peau d’un nègre. Et ils le mettront dans ta nourriture. Or, toi, prends garde d’en goûter. »

Et donc, lorsque le jeune prince fut monté chez la femme de son père, elle mit le manger devant lui. Et il prit le manger et, à son tour, le mit devant le