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histoire de baïbars… (le 8e capitaine…)
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la poule de la casserole et la mettait sur un plat de porcelaine et la couvrait d’un foulard de mousseline. Et son âme d’écolier souhaita vivement manger un morceau de cette belle poule-là. Et il dit à sa mère : « Donne-m’en un morceau, ma mère. » Elle lui dit : « Tais-toi donc ! est-ce qu’elle nous appartient ? » Puis, comme elle s’était absentée un moment pour un besoin, le garçon découvrit le foulard de mousseline et, d’un seul coup de dents, trancha le cul de la poule et l’avala tout chaud. Et une des esclaves le vit, et lui dit : « Ô mon maître, quel malheur et quelle calamité sans remède ! Fuis de la maison, parce que le juif, qui va venir prendre sa poule, t’ouvrira le ventre pour en retirer le cul que tu as avalé ! » Et le garçon dit : « C’est vrai, il vaut mieux m’en aller que de perdre ce bon cul-là ! » Et il monta sur sa mule et partit.

Or, le juif ne tarda pas à venir pour prendre sa poule. Et il vit que le cul manquait. Et il dit à la mère : « Où est le cul ? » Elle répondit : « Pendant que j’étais sortie pour un besoin, mon fils a tranché le cul avec ses dents, à mon insu, et l’a avalé. » Et le juif s’écria : « Malheur à toi ! J’ai donné tout mon argent pour ce cul-là. Où est-il ton fils, le garnement, pour que je lui ouvre le ventre et l’en retiré ? » Elle répondit : « Il s’est enfui, dans sa terreur ! »

Et le juif sortit en toute hâte, et se mit à voyager, à travers les villes et les villages, en donnant le signalement du garçon, jusqu’à ce qu’il l’eût rencontré dans les champs, endormi. Et il s’approcha doucement de lui pour le tuer, quand le garçon, qui ne