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les mille nuits et une nuit

ciens. Et, entre autres histoires que j’ai entendues, elle me raconta un jour celle-ci :

Il y avait une fois, dans une contrée proche de la mer salée, un pêcheur qui était marié avec une belle. Et cette belle le rendait heureux ; et lui, également, la rendait heureuse. Et ce pêcheur descendait tous les jours pêcher, et vendait les poissons, dont le prix était juste suffisant pour leur nourriture à tous deux. Or, un jour, il tomba malade, et la journée se passa sans nourriture. Aussi, le lendemain, son épouse lui dit : « Ça va bien ! est-ce que tu ne vas pas aller aujourd’hui à la pêche ? Sinon, de quoi allons-nous vivre ? Voyons, lève-toi seulement ; et moi, comme tu es fatigué, je porterai à ta place le filet de pêche et le panier. Et, dans ce cas, si même nous ne prenions que deux poissons, nous les vendrions et nous aurions de quoi souper. » Et le pêcheur dit : « C’est bon ! » Et il se leva, et sa femme porta le panier et le filet de pêche, en marchant derrière lui. Et ils arrivèrent sur le rivage de la mer, à un endroit fertile en poissons, au pied du palais du sultan.

Or le sultan, ce jour-là, était précisément à sa fenêtre et regardait la mer. Et il aperçut la femme du pêcheur, cette belle, et approfondit sur elle ses yeux, et en devint, à l’instant même, amoureux. Et il appela sur l’heure son grand-vizir, et lui dit : « Ô mon vizir, je viens de voir la femme de ce pêcheur, qui est là, et j’en suis passionnément épris, parce qu’elle est belle et qu’il n’y a pas sa pareille, de près ou de loin, dans mon palais. » Et le vizir répondit : « L’affaire est délicate, ô roi du temps. Aussi