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histoire de baïbars… (le 2e capitaine…)
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Là-dessus, il leva la séance de justice, et se retira chez lui. Et il était si préoccupé du problème en question, qu’il ne pensa même pas à toucher au repas que sa fille, une adolescente de quatorze ans et demi, venait de lui servir. Et, hanté par son obsession, il se répétait à demi-voix : « Je suis d’abord un os ; puis je deviens un nerf ; puis je suis chair. Qui suis-je ? Hé, ouallahi, qui suis-je ? Oui, qui est-il ? Qu’est-ce que c’est que ça ? » Et il feuilleta tous ses livres de jurisprudence, et des ouvrages de médecine, et des grammaires, et des traités scientifiques, et nulle part il ne put trouver la solution de ce problème, ni quelque chose qui, de près ou de loin, pût le résoudre ou mettre sur la voie de son explication. Aussi finit-il par s’écrier : « Non, par Allah, je renonce ! Et jamais aucun ouvrage ne m’éclairera là-dessus. »

Et sa fille, qui l’observait et remarquait sa préoccupation, l’entendit qui prononçait ces dernières paroles, et lui dit : « Ô père, tu me parais soucieux et tracassé, qu’as-tu, par Allah sur toi ! Et quel est le motif de ton tracas et de tes soucis ? » Et il répondit ; « Ô ma fille, c’est un motif qui ne peut être expliqué, et c’est une affaire sans aboutissant. » Elle dit : « Explique toujours. Rien n’est caché à la science du Très-Haut. » Alors il se décida à lui raconter toute l’affaire, et à lui soumettre le problème que lui avait posé la jeune femme, mon épouse. Et elle se mit à rire, et dit : « Maschallah ! est-ce là ce problème insoluble ? Mais, ô père, c’est aussi aisé que la marche de l’eau courante. En effet, cette solution est claire et se réduit à ceci : pour la