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les mille nuits et une nuit

Alors il se leva et se mit à se promener à pas lents à travers les massifs. Et il admirait ce jardin verdoyant, que baignait l’eau des ruisseaux, où la terre était parée comme un riche dans un jour de fête ; où la rose blanche souriait à sa sœur la rose rouge ; où le langage des rossignols amoureux de leurs amantes, les roses, était touchant comme une belle musique sur des vers tendres ; où sur les lits de fleurs des parterres se manifestaient de multiples beautés ; où les gouttes de rosée, sur la pourpre des roses, étaient comme les larmes d’une jeune fille honnête qui a reçu un léger affront ; où, dans le verger, les oiseaux, ivres de joie, chantaient tous les chants de leur gosier, alors que, parmi les branches des cyprès droits sur le bord des eaux, les tourterelles, qui ont le cou orné du collier de l’obéissance, roucoulaient ; où, enfin, tout était si parfaitement beau que les jardins d’Irem ne pouvaient être en comparaison qu’un buisson d’épines.

Et, se promenant ainsi avec lenteur et précaution, le prince Diamant se trouva soudain, à un tournant d’avenue, en face d’un bassin de marbre blanc, sur le bord duquel était étendu un tapis de soie. Et, sur ce tapis, était assise nonchalamment, comme une panthère au repos, une adolescente si belle que de son éclat tout le jardin brillait. Et l’odeur des boucles de ses cheveux était si pénétrante qu’elle allait jusqu’au ciel parfumer d’ambre le cerveau des houris.

Et le prince Diamant, à la vue de cette bienheureuse qu’il ne pouvait pas plus se lasser de regarder qu’un hydropique ne se lasse de boire l’eau de