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les mille nuits et une nuit

secoué ma robe et ajusté mon turban, je marchai à dix pas derrière elle, pour ne pas attirer sur nous l’attention, mais sans la quitter un instant des yeux ; Et nous arrivâmes de la sorte au fond d’une impasse retirée, où elle me fit signe que je pouvais approcher sans crainte. Et je l’abordai en souriant et voulus, sans retard, faire respirer l’air, à côté d’elle, à l’enfant de son père. Et, pour ne point paraître un sot ni un idiot, je fis sortir l’enfant en question, et lui dis : « Il est présent, ô ma maîtresse ! » Mais elle me regarda d’un air méprisant, et me dit : « Rentre-le, ô capitaine Moïn, car il va attraper un coup d’air. » Et moi je répondis par l’ouïe et l’obéissance, et ajoutai : « Il n’y a point d’inconvénient, et tu es la maîtresse, et je suis le comblé de tes faveurs. Mais, ô fille légitime, puisque ce qui te tente n’est pas ce gros nerf de confiture, ni ce zebb avec sa garniture, pourquoi m’as-tu gratifié de deux bourses pleines, et m’as-tu chatouillé le nombril, et m’as-tu amené jusqu’ici, dans cette impasse obscure favorable aux sauts et aux assauts ? » Et elle me répondit : « Ô capitaine Moïn, tu es l’homme en qui j’ai le plus de confiance en cette ville, et c’est pourquoi je me suis adressée à toi de préférence à tout autre. Mais c’est pour un tout autre motif que celui que tu croyais ! » Et moi je dis : « Ô ma maîtresse, quel que soit le motif, il est agréé. Parle, quel service réclames-tu de l’esclave que tu as acheté moyennant deux bourses de cent drachmes ? » Et elle sourit, et me dit : « Puisses-tu vivre longtemps ! Voici ! Sache, ô capitaine Moïn, que je suis une femme éperdument éprise d’une jouvencelle. Et son amour