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les mille nuits et une nuit

mains, et releva son voile de visage. Et elle fut comme la lune dans sa quatorzième nuit, pure, éblouissante, blanche et sereine. Et, bien que troublée de se trouver en présence de l’émir des Croyants, elle n’oublia point ce que lui commandaient les bonnes manières, la politesse et le savoir-vivre, et, de sa voix à nulle autre pareille, elle salua le khalifat, disant : « Le salam sur toi, ô descendant du plus noble d’entre les fils des hommes, ô postérité bénie de notre seigneur Môhammad — sur Lui la prière, la paix et les grâces de choix ! — bercail et asile de ceux qui marchent dans la voie de la rectitude, intègre justicier des trois mondes. Le salam sur toi de la part de la plus soumise et de la plus éblouie de tes esclaves. »

Et Al-Rachid ayant entendu ces paroles dites avec un accent si délicieux, se dilata et s’épanouit et s’écria : « Maschallah ! ô moulage de la perfection ! » Et il la regarda encore plus attentivement, et faillit s’envoler de joie. Et Giafar et Massrour faillirent également s’envoler de joie. Puis Al-Rachid se leva de son trône et descendit vers la jouvencelle, et s’approcha d’elle et, tout doucement, lui ramena sur le visage son petit voile de soie : ce qui signifiait qu’elle était désormais de son harem, et que tout ce qu’elle était rentrait désormais dans le mystère prescrit aux élues des Croyants.

Après quoi il l’invita à s’asseoir, et lui dit : « Ô Chef-d’œuvre des Cœurs, tu es en vérité un don choisi. Mais ne pourrais-tu pas, avec ta venue qui illumine la demeure, faire entrer l’harmonie dans le palais ? Voici que notre ouïe t’appartient, comme notre vue ! »