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histoire de la jouvencelle…
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noire sur chaque tempe, un nez droit et pur comme la nacre transparente, une bouche taillée dans la pulpe des grenades mûres, et un menton creusé d’un sourire. Et, sur ce beau visage délivré du voile, de grands yeux noirs s’allongeaient, sous l’arc deux fois répété des sourcils, jusqu’à menacer les tempes de les dépasser.

Et Ishak, après l’avoir regardée un moment sans parler, lui dit encore plus doucement : « Parle, ô jeune fille, en toute confiance. » Alors elle dit d’une voix semblable à la voix de l’eau dans les fontaines : « La longueur de l’attente et le tourment de mon esprit m’ont rendue méconnaissable, ô mon maître, et les larmes que j’ai versées ont lavé mes joues de leur fraîcheur. Et pas une des roses d’autrefois ne s’y épanouit. » Et Ishak sourit et dit, l’interrompant : « Et depuis quand, ô jeune fille, les roses fleurissent-elles sur la face de la pleine lune ? Et pourquoi cherches-tu, par tes paroles, à rabaisser ta propre beauté ? » Elle répondit : « À quoi pourrait prétendre une beauté qui jusqu’ici ne vivait que pour elle-même ? Ô mon seigneur, les jours passaient depuis des mois dans ce dépôt d’esclaves, alors que je m’ingéniais, à chaque nouvel encan, à trouver un nouveau prétexte pour ne pas être vendue ; car j’attendais toujours ta venue et mon entrée dans ton école de musique, dont la renommée s’est étendue jusqu’aux plaines de mon pays. »

Et, comme elle parlait ainsi, entra le marchand, son propriétaire. Et Ishak lui demanda : « Quel prix veux-tu de la jouvencelle ? Et d’abord quel est son nom ? » Et le cheikh répondit : « Pour ce qui est de