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les rencontres… (le cheikh…)
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coute et j’obéis. » Et je me levai et allai vers mes enfants, qui jouaient dans la cour avec l’œuf en question, et le pris d’entre leurs mains, malgré leurs cris et leurs protestations. Puis je revins dans la chambre, où le juif m’attendait assis sur la natte, et j’en fermai la porte et les fenêtres de façon à y faire l’obscurité complète, tout en m’excusant du procédé. Et, cela fait, je tirai l’œuf de mon sein, et le posai, bien en vue, sur un tabouret, devant le juif.

Et aussitôt la chambre fut illuminée, comme si quarante flambeaux y eussent brûlé. Et le juif, à cette vue, ne put s’empêcher de s’écrier : « C’est la gemme de Soleïmân ben Daoud, une de celles qui ornent sa couronne ! » Et, s’étant exclamé de la sorte, il s’aperçut qu’il en avait trop dit, et se rattrapa, en ajoutant : « Mais j’en ai déjà eu de semblables entre les mains. Et, comme elles n’étaient pas de vente courante, je m’étais hâté de les revendre, avec perte ! Hélas, pourquoi faut-il maintenant que la fille de l’oncle soit enceinte et m’oblige à acquérir une chose invendable ? » Puis il me dit : « Combien, ô voisin, demandes-tu pour la vente de cet œuf marin ? » Et je répondis : « Il n’est pas à vendre, ô voisin ! mais je pourrais te le donner, pour ne point faire rentrer le désir de la fille de ton oncle ! Et j’ai déjà fixé le prix de cette cession. Je ne me dédirai pas, Allah m’est témoin ! » Et il me dit : « Sois raisonnable, ô fils des gens de bien, et ne ruine pas ma maison ! Si je vendais ma boutique et ma maison, et si je me vendais moi-même au souk des crieurs, avec ma femme et mes enfants, je ne pourrais arriver à réaliser le chiffre exorbitant que tu as fixé, par