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les mille nuits et une nuit

trouver le germe de la richesse ! Et sache bien que, moi et mon ami Si Saâdi, nous serons extrêmement réjouis d’apprendre un jour que tu es devenu, dans la prospérité, plus heureux que tu ne l’es dans les privations ! »

Alors moi, ô mon seigneur, ayant pris la bourse, je fus à la limite des transports de joie. Et mon émotion était telle que je fus incapable de faire dire à ma langue les paroles de gratitude qu’il était séant de prononcer en une pareille circonstance ; et c’est tout juste si je pus arriver à avoir assez de présence d’esprit pour m’incliner jusqu’à terre et prendre le bord de la robe de mon bienfaiteur, que je portai à mes lèvres et sur mon front. Mais il se hâta de la retirer avec modestie et prit congé de moi. Et, accompagné de son ami Si Saâdi, il se leva pour continuer sa promenade interrompue.

Quant à moi, lorsqu’ils se furent éloignés, la première pensée qui se présenta naturellement à mon esprit, fut de chercher où je pourrais bien mettre la bourse de deux cents dinars, pour qu’elle fût tout à fait en sûreté. Et comme, dans ma pauvre petite maison, composée d’une unique pièce, je n’avais ni armoire, ni odeur d’armoire, ni tiroir, ni coffre, ni rien de semblable, où cacher un objet à cacher, je fus extrêmement perplexe, et pensai un moment à aller enterrer cet argent dans quelque endroit désert, hors de la ville, en attendant de trouver le moyen de Le faire fructifier. Mais je me ravisai, en songeant que ma cachette pourrait, par malechance, être découverte ou que moi-même je pourrais être aperçu par quelque laboureur. Et aussitôt l’idée me