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les mille nuits et une nuit

l’on achète. Et, tandis que ma libératrice et sa mère m’écoutaient avec attention, je leur racontai également comment j’avais été séduit par l’étrange beauté de l’adolescente du Nord, et mon mariage avec elle, et ma complaisance et mes égards pour elle, et ma délicatesse de procédés, et ma patience à supporter ses manières extraordinaires. Et je leur fis le récit de l’épouvantable découverte nocturne, et de tout ce qui s’en suivit, depuis le commencement jusqu’à la fin, sans leur en cacher un détail. Mais il n’y a point d’utilité à le répéter.

Lorsque ma libératrice et sa mère eurent entendu mon récit, elles furent à la limite de l’indignation contre mon épouse, l’adolescente du Nord. Et la mère de ma libératrice me dit : « Ô mon fils, quel étrange errement a été ton errement ! Comment ton âme a-t-elle pu se pencher vers la fille des étrangers, quand notre ville est si riche en adolescentes de toutes les couleurs, et quand les bienfaits d’Allah sur la tête de nos jeunes filles sont si choisis et si nombreux ? Certes ! il a fallu que tu fusses ensorcelé pour avoir ainsi choisi sans discernement, et confié ta destinée aux mains d’une personne qui différait de toi par le sang, par la race, par la langue et par l’origine. Et tout cela a été, je le vois bien, l’instigation du Cheitân, du Malin, du Lapidé. Mais rendons grâces à Allah qui, par l’entremise de ma fille, t’a délivré de la méchanceté de l’étrangère, et t’a rendu à ta forme ancienne d’être humain ! » Et moi je répondis, après lui avoir baisé les mains : « Ô ma mère bénie, je me repens, devant Allah et devant ta face vénérable, de mon action inconsidérée. Et je ne