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histoire du livre magique
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ô Giafar ! Mais je suis las, cette nuit, et fatigué et oppressé. Et j’ai envoyé Massrour te dire de venir ici me distraire et dissiper mon ennui. » Et Giafar réfléchit un instant, et répondit : « Ô émir des Croyants, quand notre âme ne veut s’égayer ni par la beauté du ciel, ni par les jardins, ni par la douceur de la brise, ni par la vue des fleurs, il ne reste plus qu’un remède, et c’est le livre. Car, ô émir des Croyants, le plus beau des jardins est encore une armoire de livres. Et une promenade à travers ses rayons est la plus douce et la plus charmante des promenades ! Lève-toi donc et allons chercher quelque livre au hasard des étagères, dans les armoires des livres ! » Et Haroun répondit : « Tu dis vrai, ô Giafar, c’est le meilleur remède à l’ennui. Et je n’y avais point pensé. » Et il se leva, et, accompagné de Giafar et de Massrour, il alla dans la salle où se trouvaient les armoires des livres.

Et Giafar et Massrour tenaient chacun un flambeau, et le khalifat prenait les livres dans les armoires magnifiques et les coffres en bois de senteur, et les ouvrait et les refermait. Et il examina de la sorte plusieurs étagères, et finit par mettre la main sur un très vieux livre qu’il ouvrit au hasard. Et il tomba sur quelque chose qui dut l’intéresser vivement, car, au lieu de laisser le livre au bout d’un instant, il s’assit et se mit à le feuilleter, page par page, et à le lire attentivement. Et voici que soudain il se mit à rire tellement qu’il se renversa sur le derrière. Puis il reprit le livre et continua sa lecture. Et voici que des larmes tombèrent de ses yeux ; et il se mit à pleurer tellement que toute sa barbe en fut mouillée,