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les mille nuits et une nuit


LA NAISSANCE ET L’ESPRIT


Il y avait un homme, Syrien de naissance, qu’Allah avait doué, comme tous les Schamites de sa race, d’un sang lourd et d’un esprit épais. Car c’est une chose notoire que lorsqu’Allah distribua ses dons aux humains, il mit dans chaque terre les qualités et les défauts qui devaient se transmettre à tous ceux qui y naîtraient. C’est ainsi qu’il accorda l’esprit et la finesse aux habitants du Caire, la force copulative à ceux de la Haute-Égypte, l’amour de la poésie à nos pères Arabes, la bravoure aux cavaliers du centre, des mœurs policées aux habitants de l’Irak, la cordialité envers les hôtes aux tribus errantes, et bien d’autres dons à bien d’autres pays, mais aux Syriens il ne donna que l’amour du gain et l’esprit de commerce, et les oublia totalement quand il distribua les dons charmants. C’est pourquoi, quoi qu’il fasse, un Syrien schamite, des pays qui s’étendent de la mer salée aux confins du désert de Damas, sera toujours un lourdaud au sang épais, et son esprit ne sera jamais ouvert qu’à l’appât grossier du gain et au trafic.

Et donc le Syrien en question se réveilla, un jour d’entre les jours, avec le désir d’aller trafiquer au Caire. Et c’était, sans aucun doute, sa mauvaise destinée qui lui suggérait cette idée d’aller vivre