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les mille nuits et une nuit

avons loué, en simple location, à cet homme, un beau jardin, hautement protégé de murs et abrité ; merveilleusement entretenu et planté de fleurs et d’arbres fruitiers. Mais cet homme, après avoir cueilli toutes les fleurs et mangé tous les fruits, a abattu les murs, livré le jardin aux quatre vents, et mis partout la dévastation. Et maintenant il veut rompre le bail et nous rendre notre jardin dans l’état où il l’a mis ! Et telle est notre plainte et notre affaire, ya sidi’l kâdi ! »

Et le kâdi se tourna vers Faïrouz et lui dit : « Et toi, qu’as-tu à dire, ô jeune homme ? » Et il répondit : « En vérité, je leur rends le jardin en meilleur état qu’il n’était auparavant ! » Et le kâdi dit au frère : « Est-ce vrai qu’il rend le jardin en meilleur état, comme il vient de le déclarer ? » Et le frère dit : « Non ! Mais je désire savoir de lui le motif qui l’a poussé à nous le rendre ! » Et le kâdi demanda, en se tournant vers Faïrouz : « Qu’as-tu à dire, ô jeune homme ? » Et Faïrouz répondit : « Je le leur rends de bon cœur et à contre-cœur ! Et le motif de cette restitution, puisqu’ils souhaitent le connaître, est qu’un jour je suis entré dans le jardin en question, et j’ai vu sur sa terre les traces du passage du lion et de son pied. Et j’ai eu peur que, si je m’y hasardais de nouveau, le lion me dévorât. Et c’est pourquoi j’ai rendu le jardin à ses propriétaires. Et je ne l’ai fait que par respect pour le lion, et par peur pour moi…

— À ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et, discrète, se tut.