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les séances charmantes… (le délieur…)
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la formule du divorce, se hâta d’abaisser son voile sur son visage, afin qu’elle ne fût plus à découvert devant celui qui désormais était redevenu pour elle un étranger. Et, en même temps qu’elle, sortit de dessous la moustiquaire la personne avec qui elle était si amoureusement enlacée. Or, cette personne, qui de loin ressemblait à un jeune garçon imberbe, était, rien qu’à voir le flot de ses cheveux soudain dénoués, qui lui caressèrent les chevilles, une jeune fille.

Et, pendant que le malheureux jeune homme était immobilisé par la stupeur, deux témoins, qu’avait cachés la mère derrière un rideau, firent leur apparition, et lui dirent : « Nous avons entendu la formule du divorce, et nous témoignons que tu es divorcé d’avec ton épouse ! » Et la mère lui dit, en riant : « Eh bien, mon fils, tu n’as plus qu’à t’en aller ! Et, pour que tu ne partes pas sur une fâcheuse impression, sache que la jeune fille que voici, et qui était couchée avec ton épouse, est ma fille cadette. Et ce que tu as cru est un péché sur ta conscience ! Mais sache également que ton épouse était d’abord mariée avec un jeune homme qu’elle aimait et qui l’aimait. Mais un jour ils se disputèrent, et dans l’emportement de la dispute, mon gendre dit à ma fille : « Tu es divorcée par trois fois ! » Or c’est là, tu le sais, la plus grave formule du divorce, et la plus solennelle. Et celui qui l’a prononcée ne peut plus se remarier avec sa première épouse, si un jour il lui en prenait l’envie, à moins que son épouse ne consomme un nouveau mariage avec un second mari qui, à son tour, la répudie. Il nous fallait donc un délieur, mon