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les séances… (la fille du vendeur…)
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Or, quand tomba la nuit, la jeune Zeina se déguisa terriblement, en revêtant le costume de fer, et prit dans sa poche une paire de ciseaux et un rasoir, et saisit dans sa main une fourche pointue, et se dirigea vers le palais, dans cet attirail.

Et, du plus loin qu’ils virent arriver ce guerrier effrayant, le portier et les gardes du palais s’enfuiront dans toutes les directions. Et, dans l’intérieur du palais, les esclaves terrifiés par le vacarme assourdissant que faisaient les diverses parties du costume de fer, et par l’aspect farouche de celui qui le portait, et par la fourche qu’il brandissait, suivirent l’exemple du portier et des gardes, et se hâtèrent d’aller se terrer chacun dans quelque coin bien à l’abri. Et, de la sorte, la fille du vendeur de pois chiches, ne rencontrant aucun obstacle ni la moindre velléité de résistance, parvint sans encombre dans la chambre où d’ordinaire se tenait le jeune garnement, fils du sultan.

Et le fils du sultan, ayant entendu tout ce bruit terrible, et voyant entrer celui qui le produisait, fut saisi, à sa vue, d’un grand effroi, et crut qu’il voyait apparaître un éfrit ravisseur des âmes. Et il devint bien jaune, se mit à trembler et à claquer des dents, et tomba sur le sol, en s’écriant : « Ô puissant éfrit ravisseur des âmes, épargne-moi et Allah t’épargnera ! » Mais la jeune fille lui répondit, en prenant une voix terrifiante : « Soude tes lèvres et tes mâchoires, ô proxénète, ou je t’enfonce cette fourche dans l’œil ! » Et l’épouvanté garçon se souda quant à ses lèvres et à ses mâchoires, et n’osa plus dire un mot ni faire un mouvement. Et la fille du vendeur