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les séances… (la fille du vendeur…)
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« C’est ainsi que je réussirai à lui faire sentir ma puissance. »

Et donc, comme il était fils de sultan et qu’il avait tout pouvoir sur les âmes, il fit venir le vendeur de pois chiches et lui dit : « C’est bien toi le père des trois jeunes filles ? » Et le vendeur, tremblant, répondit : « Oui, par Allah ! ya sidi. » Et le fils du sultan lui dit : « Eh bien, ô homme, je veux que demain, à l’heure de la prière, tu reviennes ici, entre mes mains, habillé et nu à la fois, riant et pleurant au même moment, et à cheval sur une monture en même temps que marchant sur tes pieds. Et si, pour ta malechance, tu m’arrives comme tu es, n’ayant pas satisfait à mes conditions, ou si, ayant satisfait à l’une tu n’as pas rempli les deux autres, ta perte est sans recours, et ta tête sautera de tes épaules ! » Et le pauvre vendeur de pois chiches embrassa la terre et s’en alla, en pensant : « C’est là, en vérité, une affaire bien énorme ! Et ma perte est sans recours, certainement ! »

Et il arriva bien jaune de teint auprès de ses filles, avec le sac de son estomac retourné, et le nez allongé jusqu’à ses pieds.

Et ses filles virent son inquiétude et sa perplexité, et la plus petite, qui était la jeune Zeina, lui demanda : « Pourquoi, ô père mien, vois-je ton teint jaunir et le monde noircir sur ton visage ? » Et il lui répondit : « Ô ma fille, j’ai en mon être intime une calamité, et dans ma poitrine un rétrécissement ! » Et elle lui dit : « Raconte-moi la calamité, ô père, car peut-être que de la sorte cessera le rétrécissement, et se dilatera ta poitrine…