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les mille nuits et une nuit

la prier de lui prêter, à elle tortue, la grosse oie qu’elle avait dans sa basse-cour, parce qu’elle avait l’intention, elle tortue, d’aller au palais à cheval sur cette belle monture. Mais la princesse lui fit répondre, par l’intermédiaire de la langue de la servante, que si elle, princesse, avait une si belle oie, c’était pour s’en servir pour son propre usage. Et la tortue, à cette réponse, se renversa sur son derrière par la force de son rire, et envoya la servante chez la seconde princesse avec mission de lui demander, comme simple prêt pour un jour, le gros bouc qui lui appartenait. Mais la servante revint auprès de sa maîtresse, lui rapportant, sur sa langue, un refus accompagné de paroles amères et de commentaires désagréables. Et la tortue s’en convulsa et s’en trémoussa et en fut à la limite de la dilatation et de l’épanouissement.

Et, lorsque vint l’heure du festin, et que les femmes de la sultane furent, sur l’ordre de leur maîtresse, rangées en bon ordre devant la porte extérieure du harem pour recevoir les trois épouses des fils du roi, on vit soudain s’élever un nuage de poussière, qui se rapprocha rapidement. Et, au milieu de ce nuage, apparut bientôt une oie gigantesque qui courait en avant, à ras du sol, les pattes éperdues, le cou tendu et les ailes battantes, et portant, juchée sauvagement sur son dos, et la figure retournée d’épouvante, la première princesse. Et, immédiatement derrière elle, à cheval sur un bouc bêlant et ruant, toute crottée et poussiéreuse, apparaissait la seconde princesse.

Et, à cette vue, le sultan et son épouse furent