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les séances charmantes… (le fils du roi…)
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elle grosse comme une jarre-réservoir. Et voilà pour les noces du prince Schater-Môhammad avec son épouse la tortue !

Mais pour ce qui est du sultan, les années, les préoccupations du règne et les émotions de toutes sortes, sans compter le chagrin que lui avait causé le mariage de son plus jeune fils, voûtèrent son dos et amincirent ses os. Et il maigrit, et jaunit, et perdit l’appétit. Et sa vue baissa avec ses forces ; et il devint presque complètement aveugle.

Lorsque ses trois fils, qui aimaient leur père comme il les aimait, virent l’état où il se trouvait, ils résolurent de ne plus laisser le soin de sa santé aux femmes du harem, qui étaient des ignorantes et des superstitieuses ; et ils se concertèrent sur les meilleurs moyens à employer pour rendre les forces à leur père avec la santé. Et ils vinrent le trouver et, après lui avoir baisé la main, ils lui dirent : « Ô notre père, voici que ton teint jaunit et que diminue ton appétit et que s’affaiblit ta vue. Et si les choses continuent de la sorte, nous n’aurons plus qu’à nous déchirer les vêtements dans notre douleur de perdre en toi notre soutien et notre voie ! Il faut donc que tu écoutes notre conseil, parce que nous sommes tes fils, et que tu es notre père. Or, nous sommes d’avis que désormais ce soient nos épouses qui te préparent la nourriture et non point les femmes de ton harem. Car nos épouses sont fort expertes en cuisine, et feront pour toi des mets qui te rendront l’appétit, et par l’appétit les forces, et par les forces la santé, et par la santé l’excellence de la vue et la guérison de tes yeux malades. » Et le sultan fut bien touché de cette