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les mille nuits et une nuit

je veux comme épouse, et non pas une autre ! »

Et le sultan, qui aimait son fils, ne voulut point le contrarier ni lui faire de peine, et, revenant sur sa décision, il donna son consentement à cet étrange mariage.

Et de grandes fêtes et de grandes réjouissances et de grands festins, avec danses, chants et jeux d’instruments, furent donnés en l’honneur des noces des princes Schater-Ali et Schater-Hôssein, les deux fils aînés du sultan. Et quand les quarante jours et quarante nuits que durèrent les fêtes pour chaque noce furent écoulés, les deux princes entrèrent chez leurs épouses, pour la nuit nuptiale, et consommèrent leur mariage en toute félicité et vaillance.

Mais quand ce fut le tour des noces du jeune prince Schater-Môhammad avec son épouse la grosse tortue solitaire, les deux frères aînés et les deux épouses des deux frères, et les parentes, et toutes les femmes des émirs et des dignitaires refusèrent leur présence aux cérémonies, et n’épargnèrent rien pour rendre ces fêtes attristantes et moroses. Aussi le jeune prince fût-il humilié en son âme, et subit-il toutes sortes d’avanies tant par les regards que par les sourires et par les dos tournés. Mais quant à ce qui se passa lors de la nuit nuptiale, lorsque le prince fut entré chez son épouse, nul ne peut le savoir. Car tout se passa sous le voile que seuls les yeux d’Allah peuvent pénétrer. Et il en fut de même pour la nuit suivante et, d’ailleurs, pour les autres nuits. Et chacun s’étonnait qu’une pareille union pût avoir lieu ! Et nul ne comprenait comment un fils d’Adam pouvait cohabiter avec une tortue, fût-