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les séances… (histoire du bouc…)
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par mon entremise. Car désormais tu seras comme ma mère, et tout ce que possède ma main sera sous ta main. Mais, de grâce ! si tu as quelque gratitude pour les bienfaits d’Allah sur ta tête, lève-toi à l’heure et à l’instant, et conduis-moi à l’endroit où tu as vu entrer la mule avec les deux outres. Et je ne te demande pas de venir avec moi, mais de m’indiquer l’endroit seulement ! » Et la vieille répondit par l’ouïe et l’obéissance. Et, lorsque la lune se leva sur la terrasse du hammam, elles sortirent toutes deux et allèrent au bord de la rivière.

Et elles virent bientôt la mule qui s’en venait de leur côté, chargée de ses deux outres pleines d’eau. Et elles la suivirent de loin, et la virent qui frappait du sabot le sol au pied du monticule, et qui s’engageait dans le souterrain ouvert devant elle. Et la fille du roi dit à la vieille : « Toi, attends-moi ici. » Mais la vieille ne voulut point la laisser entrer seule, et la suivit, malgré l’émotion.

Et elles entrèrent dans le souterrain et arrivèrent dans la cuisine. Et de toutes les belles marmites rouges, rangées en bon ordre sur les poêles, et qui chantaient avec harmonie, se dégageaient des fumets de tout premier ordre qui dilataient les éventails du cœur, revivifiaient les membranes des narines et dissipaient les soucis des âmes en peine. Et les couvercles des marmites se levaient d’eux-mêmes sur leur passage, et des voix en sortaient joyeuses qui disaient : « La bienvenue à notre maîtresse, la bienvenue ! » Et, dans la seconde salle, les plateaux étaient rangés qui contenaient les excellentes pâtisseries, et les galettes soufflées,