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les mille nuits et une nuit

répétant avec l’accent du regret et de la douleur, ces mêmes mots : « Ô notre maîtresse ! ô souveraine de la grâce et de la beauté ! »

« Et lorsqu’ils eurent pleuré et soupiré et gémi pendant une heure de temps, l’adolescent se leva et dit : « Quand vas-tu venir ? Moi je ne puis sortir ! Ô ma souveraine, quand vas-tu venir, puisque je ne puis sortir ? » Et il descendit de son trône, et rentra dans sa peau de bouc. Et tous également descendirent de leurs trônes, et rentrèrent dans leurs peaux de boucs. Et ils s’en allèrent comme ils étaient venus.

« Et moi, quand je n’entendis plus sur le sol le bruit de leurs sabots, je me levai de ma cachette, et m’en allai également comme j’étais venue. Et je ne pus respirer à mon aise, qu’en me voyant hors du souterrain.

« Et telle est, ô princesse, mon histoire. Or, c’est là le plus grand malheur de ma vie. Car non seulement je n’ai pu satisfaire mon désir sur les marmites et les plateaux, mais je n’ai rien compris à tout ce que j’ai vu de prodigieux dans ce souterrain. Et c’est là précisément le plus grand malheur de ma vie ! »

Lorsque la vieille eut terminé de la sorte son récit, la fille du roi, qui l’avait écoutée avec un cœur battant, ne douta point que le bouc qui chevauchait son compagnon, et qui était le plus bel adolescent, ne fût son bien-aimé, et elle faillit mourir d’émotion. Et quand elle put enfin parler, elle dit à la vieille : « Ô ma mère, Allah le Miséricordieux ne t’a conduite ici que pour que ta vieillesse soit heureuse