Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 14, trad Mardrus, 1903.djvu/182

Cette page a été validée par deux contributeurs.
178
les mille nuits et une nuit

bonheur dans le mariage ne dépend ni de la richesse ni de la naissance, mais du seul décret du Tout-Puissant. Il vaut donc mieux laisser le soin à la destinée de choisir elle-même les époux de nos filles. Et elles n’auront, quand le jour sera venu de choisir, qu’à jeter chacune son mouchoir par la fenêtre, sur la foule des prétendants. Et ceux sur qui tomberont les trois mouchoirs deviendront les époux de nos trois filles. » Et le sultan avait répondu : « L’idée est excellente. » Et il en fut ainsi.

Aussi, quand vint le jour fixé par les crieurs publics, et que le meidân qui s’étendait au pied du palais fut rempli par la foule des prétendants, la fenêtre s’ouvrit, et la fille aînée du roi, comme la lune, parut la première avec son mouchoir à la main. Et elle jeta le mouchoir en l’air. Et le vent l’emporta et le fit tomber sur la tête d’un jeune émir, brillant et beau.

Puis la seconde fille du roi parut à la fenêtre, comme la lune, et jeta son mouchoir, qui alla tomber sur la tête d’un jeune prince aussi beau et aussi charmant que le premier.

Et la troisième fille du sultan de l’Inde jeta son mouchoir sur la foule. Et le mouchoir tournoya un instant, s’immobilisa un instant, et tomba pour aller s’accrocher aux cornes d’un bouc, qui se tenait parmi les prétendants. Mais le sultan, bien qu’il eût solennellement promis sa fille à n’importe quel spectateur sur qui tomberait le mouchoir, considéra l’expérience comme non avenue, et la fit recommencer. Et la jeune princesse jeta de nouveau dans les airs son mouchoir qui, après s’être arrêté entre deux airs,