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les mille nuits et une nuit

contre le soleil, l’empêchait d’éclairer cette terre. Et voilà pour le derrière de la goule !

Mais pour ce qui est du roi de cette terre, voici ! Lorsque le roi, qui régnait sur le pays, eut vu reluire le soleil, après tant d’années passées dans les ténèbres noires, il comprit que la terrible goule était morte, et il sortit de son palais, suivi de ses gardes, pour se mettre à la recherche du vaillant qui avait délivré le pays de l’oppression et de l’obscurité. Et, en arrivant sur le rivage de la mer, il vit de loin le tas de bois qui fumait encore, et dirigea ses pas de ce côté-là. Et la sœur, en voyant s’avancer toute cette troupe armée avec le roi qui brillait à sa tête, fut prise d’une grande terreur, et dit à son frère : « Ô fils de mon père et de ma mère, fuyons ! Ah ! fuyons ! » Et il demanda : « Pourquoi fuirions-nous ? Et qui nous menace ? » Elle dit : « Par Allah sur toi ! allons-nous-en, avant que nous atteignent ces gens armés qui s’avancent vers nous ! » Mais il dit : « Que non ! » Et il ne bougea pas.

Et le roi arriva avec sa troupe près du tas fumant, et trouva la goule fracassée en mille morceaux. Et il vit, à côté d’elle, une toute petite sandale de jeune fille. Or, c’était une des sandales que la sœur avait laissé échapper de son petit pied, en courant se réfugier près de son frère, derrière un monticule, où il était allé se coucher pour prendre quelque repos. Et le roi dit à ses gens : « C’est certainement la sandale de celle qui a tué la goule, et nous a délivrés de l’obscurité ! Cherchez bien, et vous la trouverez. » Et la jeune fille entendit ces paroles, et s’enhardit à sortir de derrière le monticule et à s’approcher du