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histoire de la princesse suleika
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que soudain, sous les rayons de la lune, une blancheur légère se mut parmi les cyprès, et la délectable Kaïria se montra devant mes yeux ravis. Et je me prosternai à ses pieds, le visage contre terre, sans pouvoir dire une parole, et je restai dans cet état jusqu’à ce que, de sa voix d’eau courante, elle m’eût dit : « Ô Hassân de mon amour, lève-toi, et, au lieu de ce silence tendre et passionné, donne-moi de vraies preuves de ton penchant pour moi ! Est-il possible, ô Hassân, que tu m’aies réellement trouvée plus belle et plus désirable que toutes mes compagnes, ces délicieuses jeunes filles, ces perles imperforées, et que même la princesse Suleika ! Il me faudrait l’entendre encore une seconde fois de ta bouche pour en croire mes oreilles. » Et, ayant ainsi parlé, elle se pencha vers moi et m’aida à me relever. Et moi je lui pris la main et la portai à mes lèvres passionnées, et lui dis : « Ô souveraine des souveraines, voici d’abord pour toi un chapelet de mon pays, dont tu égrèneras les grains durant les jours de ta vie heureuse, en te souvenant de l’esclave qui te l’a offert. Et, avec ce chapelet, don infime du pauvre, accepte aussi la déclaration d’un amour que je suis prêt à rendre licite devant le kâdi et les témoins. » Et elle me répondit : « Que je suis ravie de t’avoir inspiré tant d’amour, ô Hassân pour qui j’expose mon âme aux dangers de cette nuit. Mais, hélas ! je ne sais si mon cœur doit se réjouir de sa conquête, ou si je ne dois pas regarder notre rencontre comme le début des calamités et des malheurs de ma vie. » Et, ayant ainsi parlé, elle pencha sa tête sur mon épaule, tandis que des soupirs soule-