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histoire de la princesse suleika
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tendrement, en me disant : « Ô Hassân, mon cœur était chez toi, et j’étais dans un grand émoi à ton sujet. Et je n’ai point fermé l’œil de toute la nuit, en songeant qu’étranger à Schiraz, tu courais des dangers nocturnes de la part des garnements qui infestent les rues. Ah ! mon chéri, où étais-tu, loin de moi ? » Et moi je me gardai bien de lui raconter mon aventure ou de lui dire que j’avais passé la nuit avec des femmes, et me contentai simplement de lui répondre que j’avais fait la rencontre d’un marchand de Damas établi à Baghdad, qui venait de partir pour El Bassra avec toute sa famille, et qu’il m’avait retenu chez lui toute la nuit. Et mon protecteur fut bien obligé de me croire, et se contenta de pousser quelques soupirs et de me réprimander amicalement. Et voilà pour lui !

Quant à moi, je sentais mon cœur et mon esprit liés aux charmes de la délectable Kaïria, et je passai toute cette journée-là et toute la nuit à me rappeler les moindres circonstances de notre entrevue. Et, le lendemain, j’étais encore plongé dans mes souvenirs, quand un eunuque vint frapper à ma porte et me dit : « C’est bien ici qu’habite le seigneur Hassân de Damas, le chambellan de notre maître le roi Sabour-Schah ? » Et je répondis : « Tu es chez lui ! » Alors il embrassa la terre entre mes mains et se releva pour tirer de son sein un papier roulé qu’il me remit. Et il s’en alla comme il était venu.

Et moi, aussitôt, je dépliai le papier, et je vis qu’il contenait ces lignes, tracées d’une écriture compliquée : « Si le faon du pays de Scham vient cette nuit, au clair de lune, promener sa souplesse