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les mille nuits et une nuit

Rachid, qui avait entendu la réponse, se tourna vers Giafar, et lui dit : « Par la vie de ma tête ! si c’est là un maître d’école, et qu’il soit réduit à mendier sur les chemins, c’est que son histoire doit être étrange, certainement. Hâte-toi d’aller lui ordonner de se trouver demain, à l’heure de l’aveugle, à la porte de mon palais. » Et l’ordre fut exécuté. Et ils continuèrent leur promenade.

Mais ils n’avaient pas encore eu le temps de s’éloigner de l’estropié, qu’ils l’entendirent appeler à grands cris les bénédictions sur la tête d’un cheikh qui s’était approché de lui. Et ils regardèrent de son côté, pour voir quelle pouvait être l’affaire. Et ils virent que le cheikh essayait de s’esquiver, tout confus des bénédictions et des louanges auxquelles il était en butte. Et ils comprirent, aux paroles de l’estropié, que l’aumône que le cheikh venait de lui remettre était encore plus considérable que celle de Massrour, et telle que le pauvre homme n’avait jamais reçu la pareille. Et Haroun exprima à Giafar son étonnement de voir un simple particulier faire preuve d’une plus grande largesse de paume que la sienne propre, et ajouta : « J’aimerais connaître ce cheikh, et approfondir le motif de sa générosité. Va donc, ô Giafar, lui dire qu’il ait à se présenter entre mes mains, dans l’après-midi de demain, à l’heure de l’aveugle et de l’estropié. » Et l’ordre fut exécuté.

Et ils allaient poursuivre leur chemin, quand ils virent s’avancer sur le pont un magnifique cortège, comme n’en peuvent d’ordinaire déployer que les rois et les sultans. Et des crieurs à cheval le précé-