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les rencontres… (l’aveugle…)
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de part et d’autre, s’assit auprès de moi. Et nous mîmes nos provisions en commun, et, selon les habitudes du désert, nous prîmes ensemble notre repas. Après quoi nous nous mîmes à nous entretenir de choses et d’autres, et nous nous interrogeâmes mutuellement sur notre voyage et sa destination. Et il me dit qu’il se dirigeait vers Bassra, et je lui dis que j’allais à Baghdad. Et, l’intimité ayant régné entre nous, je lui parlai de mes affaires et de mes gains, et je lui fis part de mes projets de richesse et d’opulence.

Et le derviche, m’ayant laissé parler jusqu’au bout, me regarda en souriant et me dit : « Ô mon maître Baba-Abdallah que de peines tu prends pour arriver à un résultat si peu proportionné, quand il suffit quelquefois d’un tournant de chemin pour que la destinée vous rende, en un clin d’œil, non seulement plus riche que tous les conducteurs de chameaux de l’Irak mais plus puissant que tous les rois réunis de la terre. » Puis il ajouta : « Ô mon maître Baba-Abdallah, as-tu jamais entendu parler de trésors cachés et de richesses souterraines ? » Et je répondis : « Certes, ô derviche, j’ai souvent entendu parler de trésors cachés et de richesses souterraines. Et nous savons tous que chacun de nous peut un jour, si tel est le décret du destin, se réveiller plus opulent que tous les rois. Et il n’y a pas un laboureur qui, en labourant sa terre, ne songe qu’un jour doit venir où il tombera sur la pierre scellée de quelque trésor merveilleux, et il n’y a pas un pêcheur qui ne sache, en jetant à l’eau ses filets, qu’un jour viendra où il retirera la perle ou