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le trésor sans fond
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aimables garçons que tu m’as donnés, tu dois être, non seulement l’homme le plus riche de la terre, mais certainement l’homme le plus heureux. Car tu dois posséder dans ton palais les plus belles filles de l’Orient et les plus belles adolescentes des îles de la mer ! » Et le jeune homme répondit tristement : « Certes, ô mon seigneur, j’ai en grand nombre, dans ma demeure, des esclaves d’une beauté remarquable, mais puis-je les aimer, moi dont la chère disparue remplit la mémoire, la douce, la charmante, celle qui fut précipitée, à cause de moi, dans les eaux du Nil ? Ah ! j’aimerais mieux n’avoir pour toute fortune que celle contenue dans la ceinture d’un portefaix de Bassra et posséder Sabiba, la sultane favorite, que de vivre sans elle avec tous mes trésors et tout mon harem ! » Et le khalifat admira la constance de sentiments du fils d’Abdelaziz, mais il l’exhorta à faire tous ses efforts pour surmonter ses regrets. Puis il le remercia de la magnifique réception qu’il lui avait faite et prit congé de lui pour s’en retourner à son khân, s’étant assuré de la sorte, par lui-même, de la vérité des assertions de son vizir Giafar qu’il avait fait jeter dans un cachot. Et il reprit, le lendemain, le chemin de Baghdad avec tous les serviteurs, l’adolescente, les deux jeunes garçons et tous les présents qu’il devait à la générosité sans pareille d’Aboulcassem.

Or, dès qu’il fut de retour au palais, Al-Rachid se hâta de remettre en liberté son grand-vizir Giafar, et, pour lui prouver combien il regrettait de l’avoir puni d’une façon préventive, lui fit cadeau des deux jeunes garçons, et lui rendit toute sa confiance. Puis,