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le trésor sans fond
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cassem, d’un air fort affligé, répondit : « Seigneur, tu as sans doute, pour parler de la sorte, sujet de te plaindre de ma réception, ou peut-être que mes présents t’ont déplu par leur peu d’importance ? Sans quoi, tu ne serais pas revenu de ton khân pour me faire subir cet affront. » Et Haroun, toujours déguisé en marchand, répondit : « Allah me garde de répondre à ton hospitalité par un tel procédé, ô trop généreux Aboulcassem ! La cause de ma venue tient uniquement au scrupule où je suis de te voir prodiguer ainsi à des étrangers que tu as vus pour la première fois des objets si rares, et à ma crainte de voir s’épuiser, sans que tu en recueilles la satisfaction que tu mérites, un trésor qui, quelque inépuisable qu’il puisse être, doit avoir un fond ! »

À ces paroles d’Al-Rachid, Aboulcassem ne put s’empêcher de sourire, et répondit : « Calme tes scrupules, ô mon maître, si vraiment un tel motif m’a procuré le plaisir de ta venue. Sache, en effet, que tous les jours d’Allah, je me libère de mes dettes à l’égard du Créateur — qu’Il soit glorifié et exalté ! — en faisant à ceux qui frappent à ma porte un ou deux ou trois cadeaux équivalents à ceux qui sont entre tes mains. Car le trésor que m’octroya le Distributeur des richesses est un trésor sans fond. » Et, comme il voyait un grand étonnement marquer les traits de son hôte, il ajouta : « Je vois, ô mon maître, qu’il faut que je te fasse la confidence de certaines des aventures de ma vie, et que je te raconte l’histoire de ce trésor sans fond, qui est une histoire si étonnante et si prodigieuse que si elle était écrite avec les aiguilles sur le coin intérieur de l’œil, elle servi-