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le trésor sans fond
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monde, y compris l’émir des Croyants lui-même, ne l’égale en largesse de paume et en générosité ! »

Lorsque le khalifat eut entendu ces dernières paroles de son vizir, il se sentit extrêmement dépité ; et il devint bien rouge de teint, avec des yeux enflammés ; et, regardant Giafar avec hauteur, il lui dit. : « Malheur à toi, ô chien d’entre les vizirs ! comment oses-tu mentir devant ton maître, en oubliant qu’une telle conduite entraîne ta mort sans recours ? » Et Giafar répondit : « Par la vie de ta tête ! ô émir des Croyants, les paroles que j’ai osé prononcer en ta présence sont des paroles de vérité. Et si j’ai perdu tout crédit en ton esprit, tu pourras les faire contrôler, et me punir ensuite si tu trouves qu’elles sont mensongères. Quant à moi, ô mon maître, je ne crains pas de t’affirmer que j’ai été, lors de mon dernier voyage à Bassra, l’hôte ébloui du jeune Aboulcassem. Et mes yeux n’ont pas encore oublié ce qu’ils ont vu, mes oreilles ce qu’elles ont entendu, et mon esprit ce qui l’a charmé. C’est pourquoi, même au risque de m’attirer la disgrâce de mon maître, je ne puis m’empêcher de proclamer qu’Aboulcassen est l’homme le plus magnifique de son temps ! »

Et Giafar, ayant ainsi parlé, se tut. Et le khalifat, à la limite de l’indignation, fit signe au chef des gardes d’arrêter Giafar. Et l’ordre fut exécuté sur le champ. Et, cela fait, Al-Rachid sortit de la salle et, ne sachant comment exhaler sa colère, alla dans l’appartement de Sett Zobéida, son épouse, qui pâlit d’effroi en lui voyant le visage des jours noirs.

Et Al-Rachid, les sourcils contractés et les yeux