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les mille nuits et une nuit

des coups d’œil, de temps en temps, sur l’hôte qui n’aimait pas le sel. Et lorsque le repas fut terminé, Morgane sortit pour laisser son maître Ali Baba s’entretenir à son aise avec son hôte invité.

Mais au bout d’une heure, la jeune fille fit de nouveau son entrée dans la salle. Et, à la grande surprise d’Ali Baba, elle était habillée en danseuse, le front diadémé de sequins d’or, le cou orné d’un collier de grains d’ambre jaune, la taille prise dans une ceinture aux mailles d’or, et des bracelets à grelots d’or aux poignets et aux chevilles. Et de sa ceinture pendait, selon la coutume des danseuses de profession, le poignard à manche de jade et à longue lame évidée et pointue qui sert à mimer les figures de la danse. Et ses yeux de gazelle enamourée, déjà si grands par eux-mêmes et si profonds d’éclat, étaient durement allongés de kohl noir jusqu’à ses tempes, de même que ses sourcils tendus en arc menaçant. Et ainsi parée et attifée, elle s’avança à pas comptés, toute droite et les seins en avant. Et, derrière elle, entra le jeune esclave Abdallah tenant de sa main gauche, à la hauteur de son visage, un tambour à castagnettes de métal, sur lequel il frappait en mesure, mais très lentement, de façon à rythmer les pas de sa compagne. Et lorsqu’elle fut arrivée devant son maître, Morgane s’inclina gracieusement et, sans lui donner le temps de revenir de la surprise où l’avait plongé cette entrée inattendue, elle se tourna vers le jeune Abdallah et lui fit un léger signe avec ses sourcils. Et soudain le rythme du tambour s’accéléra sur un mode fortement cadencé, et Morgane, glissant comme un oiseau, dansa.