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histoire d’ali baba…
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sous le heurt du caillou. Puis il attendit, ne doutant pas qu’il allait voir surgir ses gaillards avec leurs armes brandies. Mais rien ne bougea. Alors, s’imaginant qu’ils étaient endormis dans leurs jarres, il leur jeta de nouveaux cailloux, mais pas une tête n’apparut, et pas un mouvement ne se produisit. Et le chef des voleurs fut extrêmement irrité contre ses hommes qu’il croyait plongés dans le sommeil ; et il descendit vers eux, en pensant : « Les fils de chiens ! ils ne sont bons à rien ! » Et il s’élança vers les jarres, mais ce fut pour reculer, tant était épouvantable l’odeur d’huile brûlante et de chair brûlée qui s’en exhalait. Pourtant il s’en approcha de nouveau et, y portant la main, il en sentit les parois aussi chaudes que celles d’un four. Alors il ramassa une gerbe de paille, l’alluma et regarda dans les jarres. Et il vit ses hommes, l’un après l’autre, bouillis et fumants avec des corps sans âme.

À cette vue, le chef des voleurs, comprenant de quelle mort atroce avaient péri ses trente-sept compagnons, fit un bond prodigieux jusqu’au haut du mur de la cour, sauta dans la rue et livra ses jambes au vent. Et il s’envola et s’enfonça dans la nuit, anéantissant, sous ses pas, la distance…

— À ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et, discrète, se tut.