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histoire d’ali baba…
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voleur s’écria : « Béni soit le sein qui t’a allaité, et puisses-tu longtemps encore enfiler l’aiguille et chausser les pieds honorables, ô cheikh de bon augure ! Certes, je ne souhaite que me conformer à tes indications, afin que tu essayes de retrouver la maison dans la cave de laquelle se passent des choses si prodigieuses ! » Alors le cheikh Mustapha se décida à se lever, et le derviche lui banda les yeux et le mena par la main dans la rue, et marcha à ses côtés, tantôt le conduisant et tantôt guidé par lui, à tâtons, jusqu’à la maison même d’Ali Baba. Et cheikh Mustapha dit : « C’est certainement là, et pas ailleurs. Je reconnais la maison à l’odeur de crottin d’âne qui s’en exhale, et à cette borne-ci où j’ai butté du pied la première fois ! » Et le voleur, à la limite de la joie, se hâta, avant d’enlever le bandeau au savetier, de faire une marque à la porte de la maison, avec un morceau de craie qu’il avait sur lui. Puis il rendit la vue à son compagnon, le gratifia d’une nouvelle pièce d’or, et le congédia après l’avoir remercié et lui avoir promis qu’il ne manquerait pas d’acheter des babouches chez lui pour le reste de ses jours. Et il se hâta de reprendre le chemin de la forêt, pour aller annoncer sa découverte au chef des quarante. Mais il ne savait pas qu’il courait droit pour voir sa tête sauter de ses épaules, comme on va le voir.

En effet, lorsque la diligente Morgane sortit pour aller aux provisions, elle aperçut sur la porte, à son retour du souk, la marque blanche que le derviche-voleur y avait faite. Et elle l’examina avec attention, et pensa en son âme attentive : « Cette marque-là ne s’est pas faite d’elle-même sur cette porte. Et la