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les mille nuits et une nuit

son arrivée, pénétra avec ses ânes dans la petite cour de sa maison. Et il dit, en se tournant vers la porte : « Sésame, referme-toi ! » Et la porte, tournant sur elle-même, alla rejoindre sans bruit son loquet. Et Ali Baba fut de la sorte convaincu qu’il était désormais détenteur d’un incomparable secret doué d’une puissance mystérieuse, dont l’acquisition ne lui avait guère coûté d’autre tourment qu’une émotion passagère plutôt due à la mine rébarbative des quarante et à l’aspect farouche de leur chef.

Lorsque l’épouse d’Ali Baba vit les ânes dans la cour et Ali Baba en train de les décharger, elle accourut en frappant ses paumes l’une contre l’autre de surprise, et s’écria : « Ô homme, comment as-tu fait pour ouvrir la porte dont j’avais moi-même fermé le loquet ? Le nom d’Allah sur nous tous ! Et qu’apportes-tu, en ce jour béni, dans ces gros sacs si lourds que je n’ai jamais vus à la maison ? » Et Ali Baba, sans répondre à la première question, dit : « Ces sacs nous viennent d’Allah, ô femme. Mais toi, viens m’aider à les porter dans la maison, au lieu de me tourmenter de questions sur les portes et les loquets. » Et l’épouse d’Ali Baba, comprimant sa curiosité, vint l’aider à charger les sacs sur son dos et à les porter, l’un après l’autre, à l’intérieur de la maison. Et comme elle les palpait chaque fois, elle sentit qu’ils contenaient de la monnaie, et pensa que cette monnaie devait être de la vieille monnaie de cuivre ou quelque chose d’approchant. Et cette découverte, quoique fort incomplète et bien au-dessous de la réalité, jeta son esprit dans une grande inquiétude. Et elle finit par se persuader que son époux avait dû