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les mille nuits et une nuit

vertus et te fais ouvrir les portes de roc et les fabuleuses cavernes, ô bûcheron béni ! C’est là une grande grâce du Rétributeur, qui te rend ainsi le maître des richesses accumulées par les crimes de générations de voleurs et de bandits. Et si tout cela est arrivé, c’est bien pour que tu puisses être désormais, avec ta famille, à l’abri du besoin, en faisant servir à un bon usage l’or du vol et du pillage ! »

Et, s’étant mis par ce raisonnement en paix avec sa conscience, Ali Baba le pauvre se pencha vers un des sacs à provisions, le vida de son contenu et le remplit rien que de dinars d’or et d’autres pièces en or monnayé, sans s’attacher à l’argent et aux autres objets de prix. Et il chargea le sac sur ses épaules et le porta au bout de la galerie. Puis il revint dans la salle voûtée, et remplit de la même manière un second sac, puis un troisième sac et plusieurs autres sacs, autant qu’il pensait que pouvaient en porter, sans faiblir, ses trois ânes. Et, cela fait, il se tourna vers l’entrée de la caverne et dit : « Sésame, ouvre-toi ! » Et dans l’instant les deux battants de la porte rocheuse s’ouvrirent dans toute leur largeur, et Ali Baba courut rassembler ses ânes et les fit approcher de l’entrée. Et il les chargea des sacs, qu’il prit soin de cacher habilement, en accommodant des branchages par-dessus. Et, quand il eut achevé cette besogne, il prononça la formule de fermeture, et les deux moitiés du rocher se rejoignirent aussitôt.

Alors Ali Baba poussa devant lui ses ânes chargés d’or, en les encourageant d’une voix pleine de respect, et non point en les accablant des malédictions et des injures retentissantes qu’il leur adressait d’or-