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les mille nuits et une nuit

Allah ! tu as raison. Mais comme je revenais, ce matin, de mon potager, je dis à moi-même : « Ô un tel, l’heure est vraiment trop matinale pour le souk, et tu feras bien d’aller porter cette botte de légumes frais à une telle, qui réjouira ton cœur, car elle est bien gentille. » Et elle dit : « Sois donc le bienvenu ! » Et elle réjouit son cœur, et il lui donna ce qu’elle aimait le mieux, un concombre héroïque et une courge de valeur. Et ils n’avaient pas encore fini le travail du potager, qu’ils entendirent frapper à la porte ; et il demanda : « Qui est-ce ? » Et elle répondit : « Je ne sais pas, mais toi va vite, en attendant, te cacher dans les cabinets. » Et il se hâta d’aller s’enfermer là-dedans. Et il trouva la place occupée déjà par le pâtissier, et il lui dit : « Qu’est-ce que c’est que ça ? Et que fais-tu là ? » Et l’autre répondit : « Je suis ce que tu es, et je fais ici ce que tu viens y faire toi-même. » Et ils se rangèrent l’un à côté de l’autre, le marchand de légumes portant sur son dos la botte de légumes que l’adolescente lui avait recommandé d’emporter pour ne pas trahir sa présence dans la maison.

Or, pendant ce temps, la jeune femme était allée ouvrir la porte. Et voici devant elle son troisième amant, le boucher, qui arrivait avec, comme cadeau, une belle peau de mouton à laine frisée, à laquelle on avait conservé les cornes. Et elle lui dit : « Un peu trop tôt ! un peu trop tôt ! » Et il répondit : « Eh oui, par Allah ! j’avais déjà égorgé les moutons de la vente, et je les avais déjà accrochés dans ma boutique, quand je dis à moi-même : « Ô un tel, les souks sont encore vides, et tu feras bien d’aller por-