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les mille nuits et une nuit

un regard de travers, et leur cria : « Allez-vous-en un peu ! » Et les eunuques s’éloignèrent, en maudissant entre leurs lèvres la vieille calamiteuse.

Tout cela ! Et moi je voyais sans être vu, grâce au kohl de mon défunt maître — qu’Allah l’ait en Ses bonnes grâces !

Or donc, lorsque sa mère et sa nourrice l’eurent ainsi, en un instant, harcelée de pressantes questions, en allongeant le cou pour voir ce que pouvait bien être l’affaire, la jeune fille rougissante et endolorie, finit par prononcer : « C’est là ! c’est là ! le pincement ! le pincement ! » Et les deux femmes regardèrent et virent, sur l’honorable, la trace rouge et déjà enflée de mon pouce et de mon doigt du milieu. Et elles reculèrent effarées et formalisées à l’extrême, en s’écriant : « Ô maudite, qui t’a fait ça ? qui t’a fait ça ? » Et la jeune fille se mit à pleurer, en disant : « Je ne sais pas ! je ne sais pas ! » Et elle ajouta : « J’ai été pincée comme ça, alors que je rêvais, dans mon sommeil, que je mangeais un gros concombre ! » Et les deux femmes, en entendant ces paroles, se penchèrent en même temps, et regardèrent sous les rideaux, et sous les draperies et sous la moustiquaire ; et, n’ayant rien trouvé de suspect, elles dirent à la jeune fille : « Es-tu bien sûre que tu ne t’es pas pincée toi-même, en dormant ? » Elle répondit : « Je préférerais mourir que de me pincer si cruellement ! » Alors la vieille nourrice opina, disant : « Il n’y a de recours et de puissance qu’en Allah le Très-Haut, l’Omnipotent. Celui qui a pincé notre fille est un innommable d’entre les innommables qui peuplent l’air ! Et il a dû entrer ici par cette fenêtre ouverte et, ayant