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histoire de gerbe-de-perles
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c’est la première fois que pareille chose arrive, et que notre maître se trouve seul dans la salle des festins. Il est bien étrange que, malgré la douceur de cette journée de printemps, aucun promeneur n’ait choisi, comme but de repos, nos jardins si beaux qu’on vient d’ordinaire les visiter du fond des provinces. »

En entendant ces paroles des deux adolescents, Al-Môtazid fut extrêmement étonné de savoir que non-seulement il existait, dans sa capitale, un seigneur de haut rang dont la demeure lui était inconnue, mais que ce seigneur menait une vie aussi singulière et qu’il n’aimait pas la solitude pendant les repas. Et il pensa : « Par Allah ! moi, qui suis le khalifat, j’aime souvent être seul à seul avec moi-même, et je mourrais dans le plus bref délai s’il me fallait sentir à perpétuité une vie étrangère à côté de la mienne ! car la solitude est si inestimable, quelquefois ! »

Puis il dit à son fidèle commensal : « Ô Ibn-Hamdoun, ô conteur à la langue de miel, toi qui connais toutes les histoires du passé et n’ignores rien des événements contemporains, savais-tu l’existence de l’homme propriétaire de ce palais ? Et ne penses-tu pas qu’il est urgent que nous fassions la connaissance de l’un de nos sujets dont la vie est si différente de la vie des autres hommes, et si étonnante de faste solitaire ? Et, d’ailleurs, cela ne me donnera-t-il pas l’occasion d’exercer, à l’égard de l’un de mes nobles sujets, une générosité que je voudrais plus magnifique encore que celle avec laquelle il doit traiter ses hôtes de hasard ? » Et le conteur Ibn-Hamdoun ré-