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les mille nuits et une nuit

temps, et le motif de cette pénurie réside sans doute dans l’affaiblissement de l’intelligence chez les créatures d’Allah ! » Puis il ajouta : « Nous pouvons tout de même, ô roi du temps, te montrer trois fous qui sont ici depuis un certain temps, et qui nous ont été amenés, l’un après l’autre, par des personnes de haut rang, avec défense de les montrer à qui que ce soit, petit ou grand. Mais rien ne peut être caché à notre maître le sultan ! » Et il ajouta : « Ce sont, sans aucun doute, de grands savants, car ils lisent dans les livres, tout le temps ! » Et il mena le sultan et le vizir vers un pavillon écarté, où ils les introduisit, pour ensuite s’éloigner, respectueusement.

Et le sultan Mahmoud et son vizir aperçurent trois jeunes gens enchaînés au mur, dont l’un lisait, tandis que les deux autres écoutaient attentivement. Et tous trois étaient beaux, bien faits, et ne présentaient aucun aspect de démence ou de folie. Et le sultan se tourna vers son compagnon et lui dit : « Par Allah, ô mon vizir, le cas de ces trois jeunes gens doit être un cas bien étonnant, et leur histoire une surprenante histoire ! » Et il se tourna vers eux, et leur dit : « Est-ce réellement pour cause de folie que vous avez été enfermés dans ce maristân ? » Et ils répondirent : « Non, par Allah ! nous ne sommes ni fous ni déments, ô roi du temps, et nous ne sommes même pas idiots ou stupides. Mais si singulières sont nos aventures et si extraordinaires nos histoires, que, si elles étaient gravées avec les aiguilles sur l’angle de nos yeux, elles seraient une leçon salutaire à ceux qui seraient capables de les déchiffrer ! » Et le sultan et le vizir, à ces paroles, s’assirent par terre en face des