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histoire compliquée de l’adultérin…
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vue, je découvris, blottie sous un arbre, une petite fille de cinq ans que sa mère, une Ghaziya, avait dû perdre ou oublier dans l’oasis, auprès des puits de Zobéida. Et, en vérité, ô mon maître souverain, cette fillette, brune comme la datte mûre, était si mignonne et si jolie que je déclarai, séance tenante, que je la prenais à ma charge. Et, malgré qu’elle fût effarouchée comme une jeune biche à sa première sortie dans les bois, je réussis à l’apprivoiser, et la confiai à la mère de mes enfants qui l’éleva comme si elle avait été sa propre fille. Et elle grandit au milieu de nous et se développa si bellement, qu’à sa puberté nulle fille du désert, quelque merveilleuse qu’elle fût, ne pouvait lui être comparée. Et moi, ô mon seigneur, je sentais mon cœur épris d’elle, et, ne voulant point m’unir à elle par l’illicite, je la pris pour ma femme légitime, en l’épousant, malgré son origine inférieure. Et, grâce à la bénédiction, elle me donna la fille que tu as daigné élire pour ta favorite, ô roi du temps ! Et telle est la vérité sur la mère de ma fille, et sur sa race et son origine. Et je jure, par la vie de notre prophète Môhammad — sur Lui la prière et la paix ! — que je n’ai point ajouté une syllabe à la vérité, et que je n’en ai point retranché une syllabe. Mais Allah est plus véridique et le seul infaillible ! »

Lorsque le sultan eut entendu cet aveu sans artifice, il se sentit soulagé d’un souci torturant et d’une inquiétude pleine de douleur. Car il s’était imaginé que sa favorite était la fille d’une prostituée d’entre les filles Ghaziyas, et il venait d’apprendre précisément le contraire, puisque, bien que Ghaziya, la