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les mille nuits et une nuit

errante des Ghaziyas, une fille de prostituée ! »

À ces paroles, la fureur du sultan devint si intense que les cris restèrent au fond de sa gorge. Et ce ne fut qu’au bout d’un bon moment qu’il put s’exprimer, disant à son grand-vizir : « Va vite et m’amène ici le père de ma favorite, qui est l’intendant de mon palais ! » Et il continua à tenir sous son genou le généalogiste, qui était le troisième mangeur de haschich. Et lorsque le père de sa favorite fut arrivé, il lui cria : « Tu vois ce pal, n’est-ce pas ? Eh bien, hâte-toi, si tu ne veux pas te voir au-dessus de sa pointe, de me dire la vérité au sujet de la naissance de ta fille, ma favorite ! » Et l’intendant du palais, père de la favorite, répondit : « J’écoute et j’obéis ! » Et il dit :

« Sache, ô mon maître souverain, que je vais te dire la vérité, car elle est le seul salut. Dans ma jeunesse, je vivais la vie libre du désert, et je voyageais en escortant les caravanes qui me payaient la redevance du passage sur le territoire de ma tribu. Or, un jour, que nous étions campés près des puits de Zobéida — que les grâces et la miséricorde d’Allah soient sur elle ! — vint à passer une troupe de femmes de la tribu errante des Ghaziyas, dont les filles, une fois à l’âge de la puberté, se prostituent aux hommes du désert, en voyageant d’une tribu à l’autre, et d’un campement à l’autre, offrant leurs grâces et leur science de l’amour aux jeunes cavaliers. Et cette troupe resta au milieu de nous pendant quelques jours, et nous quitta ensuite pour aller trouver les hommes de la tribu voisine. Et voici qu’après son départ, alors qu’elle était déjà hors de